21 janv. 2013


Le désert. Une grosse pierre noire irrégulière micashisteuse qui lance des éclats comme des clins d'oeil au passant éventuel, un pèlerin égaré à la recherche d'une source. Il fait soif. Le rêve d'une oasis verdoyante taraude le voyageur solitaire. Une oasis de mots truculents, frais, chatoyants, luxuriants, qu'il pourrait emmener en voyage pour qu'ils couvrent le désert de la page.
Ils serviraient à nommer les détails du désert : les divers grains de sable, la vipère à cornes qui serpente sous le sable, l'iguane qui se cache derrière la pierre noire, le lion invisible qui dort quelque part. Mais les mots sont las jusqu'à s'affaler sans vie et disparaître.
Que faire pour les séduire, les attirer dans le stylo d'où ils s'écouleront ensuite vers la page blanche, la vivifiant pour la rendre porteuse de sens. Il semble n'y avoir rien à faire, le climat du jour est désertique.
Dans ce désert trône la grosse pierre noire irrégulière, anguleuse et qui lance des éclats sous un ciel trop bleu.
Pierre noire appelle nuages blancs. La pluie finira par venir, peut-être. Qu'est-ce que la pluie ? Une magicienne fluidique, druidique, qui hante les tropiques et s'abat violemment sur la terre désertique. Elle s'exprimera par des perles d'eau dégoulinant en rideaux de lumière qui lance des éclats comme des clins d'oeil à la pierre noire dans ce désert de sable jaune. Du jaune, du noir, de la lumière, de l'ombre. Qu'en disent les mots brillants d'absence ? Peu de chose. Ils sont réticents à s'exprimer, retiennent le sens caché désespérant leur manipulateur.


Jean Cocteau

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